Ceci est ma troisième newsletter sur la bulle de l'IA. Après avoir exploré le pour et le contre, me voici à nouveau inquiet. Je vous explique pourquoi.
48 heures après les résultats du 3ème trimestre de Nvidia et la sortie de Google Gemini 3, quelques constats s'imposent à nous.
Nous avons trop de capital investi dans l’IA et des stratégies qui manquent cruellement de différenciation. Dans cette ruée vers l'or, tout le monde a pensé à tout, sauf à une seule chose : la réalité physique du monde informatique.
En marge du sommet organisé à Berlin, lors d’une conversation sur nos forces et faiblesses avec notre ambassadeur en Allemagne et quelques entrepreneurs, j’ai abordé un thème qui m’est cher : la maintenance est aussi importante que l’innovation.
J’ai toujours pensé que la vraie force de la France résidait dans sa capacité à créer des « infrastructures humanistes ». Des systèmes de confiance, pensés pour le bien commun : le train, l’énergie nucléaire, ou encore notre gestion de l'eau (une véritable école française).
Malheureusement, nous avons privatisé ces bijoux. Avec le recul, on réalise que cela a essentiellement servi à financer le train de vie des baby-boomers, sans que nous parvenions à trouver de nouvelles sources de croissance dans le numérique. Le bilan est sévère : nous sommes aujourd'hui importateurs nets de numérique alors que nous aurions dû être des leaders mondiaux.
Pour le dire clairement : il manque aujourd'hui 3 ou 4 « Dassault Systèmes » en France.
Certes, tout n’est pas parfait chez nous. On déplore le manque de soudeurs dans la filière nucléaire et le fait que les métiers qui ne sont pas dans une forme d'abstraction intellectuelle soient souvent mal compris, voire méprisés. Pourtant, nous n’avons pas tout le temps à rougir.
Quand je vois les plaques de métal posées à la hâte sur la Highway 101 entre San Francisco et Mountain View pour boucher les trous, et l’état catastrophique de cette autoroute mythique de la Silicon Valley les jours de pluie, je me dis que notre modèle a aussi du bon. Nous n'avons simplement pas su valoriser notre savoir-faire infrastructurel comme un outil de soft power.
Un exemple me vient en tête : Je me souviens d'un jour passé avec l'un des meilleurs entrepreneurs de la santé numérique aux US. En m'accompagnant à la pharmacie, il a été fasciné de me voir tendre ma Carte Vitale et repartir avec mes médicaments en quelques secondes. Pour lui, c’était une expérience utilisateur « magique », rendue encore plus puissante par le faite que tout les français y avait accès à la différence des US.
On a souvent tendance à se moquer des architectures en Cobol des années 70. Sauf qu'elles ont été créées par des gens qui avaient une vision à long terme, une éthique de travail et le souci de la stabilité. À force de vouloir tout "disrupter" pour le plaisir, on finit par oublier la force de la stabilité.
La France aurait dû être le pays des infrastructures modernes, intelligentes et humanistes. À l’ère du changement climatique et numérique le monde a plus que jamais besoin d’une vision où la science et l'économie servent le plus grand nombre, et non une minorité. Ce n’est pas ce que ces quinze dernières années auront produit hélas.
Je ferme cette parenthèse.
Le syndrome de l’abondance
Le problème, c'est qu'aujourd'hui, la Tech est malade du syndrome de l’abondance.
Contrairement à l'époque du Cobol, de l'Assembleur ou du C, où la mémoire coûtait cher, les développeurs modernes ne se soucient plus de l'optimisation. Elle reste trop éloignée de la machine. Je parle ici de véritable optimisation technique, pas de réduction de coûts comptables sur une BOM (Bill of Material) ou un processus numérique qui sont assez courantes.
Dans l’IA, l’exception est chinoise. Prenez DeepSeek : ils continuent d'optimiser drastiquement leur code. Pourquoi ? Parce qu'ils n'ont pas le choix. Les restrictions d'exportations américaines les ont privé des puces les plus puissantes, les forçant à ingeniosité logicielle. Quand j’ai vu DeepSeek, j’ai vraiment cru que ce genre de breakthrough viendrait de France, le pays de Fabrice Bellard qui a changé trois fois le monde de la vidéo, de la virtualisation et des télécoms avec du code d’une incroyable optimisation et beauté (FFmpeg, Qemu, Amarisoft).
Le réveil brutal : Le Mur de l'Infrastructure
Grâce à ce sommet allemand, j’ai pu approfondir ma compréhension "bas niveau" de la situation réelle des data centers. Et pour la première fois, je pense que nous entrons dans une zone de turbulences majeure.
À l'ouverture de Wall Street ce 21 novembre 2025 à 15h30, la sanction est tombée. Nvidia a perdu tous ses gains post-annonce (-6% la veille, avec une tendance lourde à la baisse). Pour vous donner une idée de la violence du mouvement : on parle d'une destruction de valeur d'un milliard de dollars par heure. Du jamais vu.
La réalité, c’est que derrière le rêve de l’IA, les fondamentaux sont pourris. Comme me l'expliquait un ami expert du secteur, il ne s'agit pas de regarder ce qui est vendu, mais ce qui est stocké et ce qui est impayé. Les créances clients explosent et les puces s'empilent. Avec plein de petits malins qui optimisent la disponibilité, on a créé des marchés secondaires et des dettes invisibles qui, comme nous l’avons déjà écrit, vont bientôt être révélées au grand jour.
A cause de la demande IA, les prix des barrettes DDR5 de mémoire 64 Go ont quadruplé en quelques mois, passant de 130 € à plus de 500 €. Cette hausse touche directement les coûts d’infrastructure, car la mémoire est essentielle pour faire tourner les GPU mais comme l'expliquait Octave, le fondateur de OVH cela va se refléter dans une forte hausse des prix du cloud en 2026.
À cela s'ajoute le coup de grâce technologique : Google Gemini 3 (sorti le 18 novembre 2025). Ce modèle surclasse la concurrence et a été entraîné avec zéro puce Nvidia (usage exclusif de TPU Google fabriqué parBroadcom). Le message aux marchés est clair : le monopole de Nvidia n'est pas éternel.

Beaucoup se sont pressés de construire sans réfléchir, car dire que l’on faisait de l’IA sous-entendait voir sa valorisation exploser. Mais maintenant, tout le monde regarde avec plus de soin les stratégies de chacun (voir ma note pour les abonnés plus bas).
Comment se préparer au Crash désormais inévitable?
Je partage aujourd'hui avec les abonnés payants une note stratégique confidentielle, initialement rédigée pour les clients de The Sovereign Way.
Dans ce dossier, nous analysons :
- Pourquoi nous allons droit dans le mur.
- Quel type de crash nous attend (ce n'est pas celui que vous croyez).
- Comment limiter votre exposition et pivoter avant qu'il ne soit trop tard.
👉 [Abonnez-vous maintenant pour accéder à la note complète]
Avant de vous laisser avec notre note stratégique en anglais je voulais répéter quelques points importants.
- C’est une bulle de l’infrastructure, pas une bulle de l’IA.
- Que l’électricité est un problème mais pas le premier problème.
- Que la stratégie de la France et de l’Europe (AI factories) nous expose fortement aux remous qui se préparent. Cela pourrait avoir un impact sur notre infrastructure IA de recherche, mais créer aussi des opportunités.
- Que nos acteurs français du datacenter ne sont pas tous exposés de la même manière aux risques.
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